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1914-1918 EN BERRY

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La guerre fut déclarée en août 1914. Beaucoup de soldats sont partis. A Bouesse, nous ne sommes pas restés nombreux, mais on a continué à faire pour le mieux. Dans le bourg, où je demeurais, il ne restait plus que les hommes très âgés, les femmes et les enfants... Ceux qui étaient fatigués, malades et qui n’avaient pas été admis. On s’aidait beaucoup les uns les autres. Mon père était charron et mon oncle forgeron... Ils ont pu continuer à travailler un peu avant de partir à leur tour. C’était très difficile de trouver des ouvriers pour faire le travail et ce n’était pas toujours évident pour se faire payer ! Malgré tout, nous n’avons pas trop souffert pendant cette période de guerre. La population n’a pas connu les privations parce que les femmes et les enfants avaient pris le relais des hommes pour les travaux des champs.
Vous savez ceux qui sont partis en ont vu. Ils n’étaient pas heureux et leurs parents non plus car ils savaient que leurs enfants vivaient des moments de souffrance et de privation. 0n ne pouvait pas aller à l’école car il y avait des réfugiés qui l’occupaient à Doidic près du Blanc. On les installait où l’on pouvait, ils arrivaient du Nord. Mon père et mes deux oncles sont partis au Front, nous avions parfois des nouvelles... Ils étaient dans la Marne !


Marie PARPIROLLES (90 ans)


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En 1914, j’avais douze ans. Les cloches se sont mises à sonner à Cluis pour annoncer la déclaration de guerre. J’entendais dans les rues tous ces gens qui disaient : “La guerre est déclarée... La guerre est déclarée !”. Tout le monde était affolé. Les hommes sont partis le baluchon sur le dos. Les femmes les accompagnaient à la gare, tout le monde pleurait. Quand ils ont commencé à revenir en permission, on allait tous les soirs, en sortant du travail, voir s’il y avait des soldats que l’on connaissait. Je me souviens d’un soldat qui s’était amouraché d’une jeune fille, si bien qu’il a retardé d’un jour son départ. Il a été dénoncé ! Les gendarmes sont venus le chercher. À ce moment-là, je travaillais chez la marchande de journaux, et j’allais souvent les chercher à la gare. Je connaissais bien tous les gendarmes et j’ai demandé à l’un d’entre eux si le jeune homme pouvait descendre du train pour faire ses adieux à la jeune fille. Il m’a répondu qu’il ne pouvait pas le faire descendre, mais que la jeune fille pouvait monter dans le train pour le voir. Puis, le train s’en est allé, et le pauvre soldat s’est fait tuer en arrivant... Il avait été envoyé en première ligne.
On trouvait quand même du ravitaillement. Nous n’avons pas eu de privation alimentaire dans notre région. Nous recevions des cartes des soldats, mais il n’y avait pas grand-chose d’inscrit dessus, seulement, que tout allait bien. Ils n’avaient pas le droit de raconter les événements du Front. J’étais en train de planter les pommes de terre lorsque se sont mises à sonner les cloches nous annonçant la fin de la guerre. C’était la joie dans le village mélangée aux pleurs et à la douleur qu’on éprouvait à l’encontre de ceux qui ne reviendraient plus jamais... Les rescapés nous ont tout raconté... L’eau jusqu’au ventre dans les tranchées, les assauts à la baïonnette...Une véritable barbarie !


Aline CAUMET (96 ans)


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