La guerre de 1939-1945
1939-1945
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Le 3 septembre 1939, la guerre était déclarée.
J’avais juste douze ans à cette époque. Il n’y
avait pas de télé et très peu de radio (TSF) pour nous
informer. En campagne, nous les enfants, nous ne comprenions pas beaucoup
la situation. Les hommes partaient la musette au dos ; les femmes et les
enfants pleuraient. Ils partaient par trains complets, y compris dans les
wagons à bestiaux où on entassait tous ces pauvres garçons.
Quelques mois plus tard, les permissionnaires nous racontaient leur
calvaire. Il y avait les décès aussi...
En mai 1940, il y a eu la débâcle. Les
Belges étaient réfugiés vers le centre de la France.
Que c’était pénible de voir tous ces bagages sur les
voitures dont beaucoup étaient trouées de balles. Les pauvres
gens n’avaient rien à manger et pas de lait pour les enfants.
Ensuite les Français ont défilé. Tout était réquisitionné,
les préaux des écoles, les granges... Il fallait les loger
quelque part et pour quelques jours. Chez mes parents, dans le grenier, il
y avait un couple d’ingénieurs. Cela n’était pas
l’idéal, mais ils se sentaient en sécurité. Il
avait aussi fallu cacher tout ce qui avait de la valeur et qui pouvait s’enterrer.
Comme nous habitions au bord de l’eau, près d’un pont, l’armée
voulait monter une mitrailleuse à la fenêtre d’une
chambre. Heureusement, il y a eu contre-ordre. Quelques jours plus tard, l’armée
allemande déambulait dans le village, et toute la France fut occupée.
Plus tard, les Allemands établissaient une ligne de démarcation
qui partageait la France en deux. Elle passait entre Tours et Loches, à
Reignac... Il y avait une zone libre et une zone occupée. Pour écrire,
nous avions des cartes toutes imprimées où il était
seulement possible de dire si la santé était bonne et
quelques mots ici et là. Il y avait aussi le marché noir. Il
fallait beaucoup marcher ou aller à vélo dans les fermes pour
trouver de quoi manger. Nous avions des tickets et il était
difficile de dépasser le nombre de grammes qui nous était
attribué. Avec des racines d’endives que l’on faisait sécher
dans le four de la cuisinière, on faisait de la chicorée. Le blé
écrasé dans le moulin à café donnait un peu de
farine pour la pâtisserie. Les rutabagas et les topinambours étaient
des plats très recherchés. Les pneus de vélos étaient
rembourrés de foin, les voitures fonctionnaient au gazogène.
Quant aux vêtements, il fallait en donner de vieux usés pour
avoir un bon de tissu ou un habit neuf. Les tissus sans ticket étaient
en acétate. Les chaussures avaient des semelles de bois. Nous avions
droit à un bon de chaussures par an quand cela était
possible. Mais cela n’était rien à côté
des malheureux qui étaient déportés dans les camps de
concentration. Il y avait le gouvernement de Vichy avec ses miliciens, mais
il y avait aussi les maquisards qui se battaient avec acharnement pour
sauver la France. Ils faisaient sauter les ponts, les lignes de chemin de
fer, ils récupéraient les parachutages envoyés par les
Anglais.
Enfin 1945, et les Allemands partirent en faisant
beaucoup de dégâts : villages brûlés, population
massacrée. Quand le 8 mai arriva, ce fut une grande joie. Puis vint
le retour des prisonniers, mais hélas, beaucoup manquaient à
l’appel !
Malgré le temps qui passe, nous n’oublions
pas cette période de notre vie.
Régine LAVAUD (68 ans)