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LE PETIT ÂNE
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Un petit âne à l’air innocent porte sur son dos trois caricatures de la beauté féminine. Les cheveux en broussaille, la figure barbouillée par ces hommes qui se sont acharnés à frotter ces jolis minois avec une grappe de raisin leur donnant ainsi le teint rougeâtre typique des apoplexies. Moi, l’âne, on me prenait pour un idiot... eux, ces hommes étaient tellement intelligents avec leurs plaisanteries stupides qu’ils voulaient m’imposer, si bien qu’un jour... je décidai de me venger. Une jeune fille, pour faire du zèle, décida de me tapoter le croupion... alors, discrètement, je levai la queue et laissai tomber un beau chapelet de crottes bien molles sur ses chaussures et le bas de son pantalon. Elle dut se boucher les narines pour ne pas trop respirer l’odeur de décomposition émanant de ces matières incrustées sur elle. Elle vomit tout son repas en nettoyant ses effets... Lequel est le plus idiot ?
Une autre fois, deux nez sales se dirigeaient vers moi pour réaliser une bêtise quelconque, alors j’ouvris toute grande ma fine bouche qui laissait apparaître une mâchoire proéminente. J’allais avec cet air terrifiant à leur rencontre. Plus ils avançaient, plus j’approchais... La peur les ayant accaparés, ils prirent leurs jambes à leur cou et se sauvèrent à toute vitesse. J’avoue que je prenais plaisir à ce petit jeu... Lequel est le plus idiot ?
Quand on me mettait entre les brancards d’une voiture pour promener ces messieurs et que j’en avais assez de les traîner, alors je stoppais net et souvent le plus simple d’esprit de la bande confectionnait un bouquet de légumes (poireaux, carottes et persil) qu’il agitait devant mon museau avec l’espoir de me faire avancer. J’étais très contrarié d’être pris pour un idiot si bien que je me déplaçais de quelques mètres, juste le temps que cet imbécile remonte dans la voiture et puis j’arrêtais de nouveau. Ils tiraient sur les guides et agitaient leur fouet, alors, je décidais de prendre le chemin du retour au galop et tout le monde suivait sans broncher... Lequel est le plus idiot ?
Un jour, on m’installa dans un champ où demeurait une jolie ânesse. Je faisais tout pour lui plaire, lui caressant amoureusement ses jolies joues contre les miennes. Nous nous faisions de grands sourires, nous échangions des mots d’amour dans notre langage. Nous ne pouvions plus résister au désir de l’amour... timidement, lèvres contre lèvres, nous échangions cet inoubliable baiser charnel qui fit vibrer tout notre corps, nous transmettant un bien-être inexplicable. Mon coeur saigna de douleur lorsque nous dûmes nous quitter, je n’ai jamais pu l’oublier.
Je porte avec fierté le joli prénom de Joseph. N’oublions pas que le petit âne et Joseph adoraient l’enfant Jésus dans la crèche.

Les douces caresses du petit âne Joseph vous disent bonsoir les amis.


Simone LORY-LEVY (84 ans)


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