ARRIVÉE DE
CHARLES LINDBERGH
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Il me semble sans aucune certitude que c’était
en mai, un samedi. À l’époque, pas de radio, pas de téléphone,
celui-ci étant réservé surtout aux commerçants.
Les nouvelles nous parvenaient uniquement par la presse. Des crieurs de
journaux circulaient sans arrêt dans les rues de Paris : “Demandez la dernière édition spéciale...” gonflant un simple fait divers pour attirer le
chaland. Chacun son métier ! Comment cette extraordinaire nouvelle,
l’arrivée imminente au Bourget de Lindbergh, a-t-elle franchi nos
six étages ?
Toujours est-il qu’abandonnant notre dîner,
nous nous retrouvions, mon mari et moi, à la queue d’une
longue file d’attente pour prendre place dans cet autobus qui
assurait la ligne vers l’aéroport.
A peine arrivés, un gros oiseau (noir me
semble-t-il ?) apparaissait dans le ciel et sur une piste que je vois tout
juste éclairée.
Une nuée, des cris, bousculades, tout s’est
passé si vite... Un homme assez grand, il me semble, à bout
de force, que l’on aidait à descendre de l’avion et
qu’on escamotait aussitôt en raison de son immense fatigue et
(Chut ! entre nous) une certaine odeur.
Nous étions là, nous l’avons aperçu
plus exactement et comme la majeure partie des spectateurs, prêts à
en rajouter. Demeurait ensuite le problème du retour sur Paris,
toute cette foule arrivée petit à petit ne cherchant plus qu’à
jouer des coudes pour reprendre les autobus, lesquels se succédaient
bien sûr... Quelle cohue !
Et c’est aux aurores que nous avons regagné
nos pénates, fourbus mais heureux... Nous y étions !
Marie-Thérèse SAUVAGET (91 ans)