Le Goût de Vivre...
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Dans les trente dernières années de ce
XXe siècle, nous avons assisté à l’évolution
de la gériatrie. Lorsque j’ai commencé à
travailler comme infirmière, dans un service de personnes âgées,
en 1966, on parlait encore de l’hospice.
À l’époque, le service qui
accueillait près de quatre-vingt femmes du troisième âge
se composait essentiellement de salles communes d’une dizaine de
lits, exiguës et vétustes. Les sanitaires étaient
inexistants ; on trouvait quelques lavabos dans le coin d’une pièce,
ou même dans les couloirs. À ce jour que de chemin parcouru !
Peu à peu une volonté politique d’améliorer
les conditions d’accueil des personnes âgées a vu le
jour. Avec la création de nouvelles structures de type V120 ou 160.
Dans les années 1975, nous avons vu apparaître la
modernisation des locaux et des soins médicaux.
Ces progrès n’auraient pas été
suffisants pour apporter un mieux-être aux résidents de ces
nouvelles maisons de retraite sans la participation active du personnel
soignant, pour vouloir faire de ces maisons d’hébergement et
de long séjour, des lieux de vie, où la personne âgée
se sent écoutée et respectée.
Je tiens en estime le personnel qui donne de son temps
avec coeur et dévouement ; qui sait être attentif et inventif,
pour proposer des activités thérapeutiques et
occupationnelles, aux personnes soignées, souvent en perte d’autonomie,
pour leur permettre d’exister.
L’association “La Voix des Grands-Chênes”,
créée dans le but de redonner goût à la vie à
des personnes âgées souffrant pour la plupart de graves
handicaps physiques, est née en 1991 à l’initiative de
Patrice Le Bail (psychologue), de Patricia Chaumont (aide-soignante) et de
Dominique Gautron qui en sont la cheville ouvrière. Des membres du
personnel et des bénévoles se sont associés pour
permettre de mener à bien ce projet. Réaliser une telle
aventure demandait audace, dynamisme, un esprit créatif et surtout
beaucoup d’amour pour la personne âgée. Merci à
celles et ceux qui ont donné de leur temps, de leur énergie
avec dévouement et générosité, pour que vive la
Voix des Grands-Chênes. Vous avez cru aux capacités des
personnes âgées. Vous avez su leur rendre la place qu’elles
méritent en leur donnant la parole. Vous leur avez témoigné
beaucoup d’attention et de respect. Vous avez fait preuve d’une
grande humanité.
Donner la parole aux aînés, que notre
société ne leur accorde plus, leur permettre de nous faire
partager leur expérience de vie, a redonné à la
plupart le sentiment de se sentir reconnus, utiles de pouvoir exister parce
que revalorisés dans le profond de leur être.
Pour illustrer cela, je vous livre la réflexion
de Marguerite Theillaumas qui a fait partie de la première équipe
rédactrice du journal. Marguerite avait reçu la visite de sa
fille, venant des Etats-Unis. À la veille de son retour vers cet
autre continent, sa vieille maman ne manifestait pas de tris-tesse à
l’approche du départ, nous disant en souriant : “Il me reste la Voix des Grands Chênes !”
Toute l’équipe des résidents qui a
contribué à la naissance du journal La Voix des Grands-Chênes aimait
fredonner le refrain de la chanson La voix des
chênes. Les paroles datent de 1888, son
auteur était S.F Borel. Elle a été créée
par M. Richard et A. Mestral. Le titre du journal a été
inspiré par cette chanson, en particulier par son refrain :
“Si vous rêvez d’amour dans
les forêts prochaines,
Ecoutez au déclin du jour la Voix des Chênes
Elle vous parlera d’amour (bis)
La douce Voix,
La douce Voix des Chênes.”
Marie-Angèle PROVOST
Cadre infirmier à la retraite